Pélissardgate ou Pernygate ?
Depuis quelques semaines Christophe Perny s’invite dans la campagne des municipales sans y être franchement le bienvenu. Il faut dire que le Président du conseil général du Jura entre dans le débat électoral par la petite porte.
En 2011, l’élu critiquait vertement les bloggeurs en expliquant : « Il y a le meilleur et le pire, surtout le pire » sur Internet. Il ajoutait alors : « C'est l'espace de la rumeur, de l'injure, le repère des lâches et des frustrés, où les "ratés" de la politique se "paient" - à l'abri derrière leur ordinateur- tel ou tel homme politique[1] ».
Depuis cette date, celui qui est devenu président du conseil général du Jura utilise fréquemment le net pour régler ses comptes avec ses adversaires politiques ou railler quiconque se risque à contredire le nouveau maître du département.
Les Jurassiens ont pris l’habitude de lire sur Facebook les amabilités que l’élu réserve à l’opposition, aux journalistes ou encore aux bloggeurs. Les élus de droite sont ainsi régulièrement qualifiés de « minables », les écologistes d’ « intégristes[2] », d’ « illuminés[3] », d’ « ayatollahs[4] » ou encore de « bons à rien et de contre tout !» Les journalistes ne sont pas épargnés, se voyant traiter au choix d’ « incompétents » ou de « malhonnêtes !»
Même les responsables politiques de gauche comme Patrick VIVERGE ne sont pas à l’abri des attaques du conseiller général de Lons. Christophe PERNY écrivait par exemple en 2011 sur celui qui fait aujourd’hui partie de sa la majorité départementale : « Ce candidat qui a trompé tout le monde, discuté avec tout le monde, (…) divisé tout le monde (…) et qui n'a qu'une ambition : sauver sa peau pour négocier avec la droite ![5] »
En 2011, l’élu de Lons sud expliquait encore que « beaucoup de choses sont produites sur le net, parfois pour le meilleur, et bien souvent pour le pire. Je lis, ce qui est écrit par exemple sur moi. Beaucoup de médisances, de mensonges, avec une constante… L’anonymat de leurs auteurs ! Heureusement que je suis devenu hermétique à ces “petites” lâchetés.[6] »
Fichtre ! Voici que l’élu a aujourd’hui recours à des "méthodes" qu’ils condamnaient pourtant sévèrement hier ! Une vidéo, publiée sur Dailymotion et visant Jacques PELISSARD, dont l’auteur a pris soin de rester inconnu en se cachant derrière le pseudonyme de Jacques JAPETO, est arrivée comme par hasard, sitôt sa mise en ligne en février dernier et en avant première, sur la page Facebook du Président du conseil général.
Bien qu’il s’en défende, certains éléments laissent à penser que JAPETO n’est peut être pas totalement un inconnu pour Christophe PERNY. Etrangement, l’élu sera le premier ami virtuel dudit JAPETO sur le réseau social et le premier à partager la fameuse vidéo. A un internaute qui lui reprochait de faire « une politique de caniveaux » ? Christophe PERNY rétorquera: « Je n'ai rien à voir avec cette vidéo qui est arrivée sur mon mur par son créateur. Je n'ai jamais fait de politique comme cela. Jamais. »
Le fameux JAPETO refait surface le 6 mars lorsqu’il partage à nouveau sur la page Facebook de l’élu lédonien un article du blog Cannes Infos visant une fois encore le maire de Lons le Saunier. Dans la foulée, Christophe PERNY partage une seconde fois lui-même cet article sur son propre mur. Les coïncidences s’accumulent !
L’article en question concerne l’acquisition par le couple PELISSARD d’un bateau et la facilité avec laquelle le maire a obtenu une place dans le port de Cannes pour amarrer son bateau. Le genre de sujet qui, touchant à l’argent privé, a l’art de mettre en rage le président des maires de France.
Fait rarissime, quelques jours plus tard, Le Progrès, qui n’a pourtant pas l’habitude d’accorder à ce genre de sujet une grande importance fait sa Une du 8 mars sur la pseudo affaire du « bateau qui embarrasse PELISSARD » lui consacrant même une pleine page intérieure.
Pour assombrir encore le tableau, il faut savoir que les relations entre le Président du conseil général et le journal sont au beau fixe, sur le plan commercial s’entend. En effet, voici quelques semaines, le Département a fait envoyer à ses frais et à plus de 2 000 personnes un exemplaire du Progrès durant toute une semaine dans le cadre du Salon de l’Agriculture soit au total 10 000 à 20 000 journaux. Très nombreux sont les Jurassiens à avoir ainsi trouvé dans leur boîte à lettres deux exemplaires de leur journal favori durant 7 jours. Christophe PERNY s’est ainsi offert, avec l’argent des contribuables, une magnifique publicité personnelle allant jusqu’à faire publier par le quotidien le 23 février une longue interview dithyrambique sur son action en faveur de l’agriculture !
Coïncidence là encore ? Une chose est certaine. La seule contribution du principal leader socialiste jurassien à la campagne municipale se résume à la promotion sur la toile d’une vidéo anonyme et d’un article publié par un blog qui n’a rien de partial et concernant tous deux Jacques PELISSARD.
Cette attitude n’est pas digne d’un élu de son rang et dont les Jurassiens sont en droit d’attendre un peu plus de hauteur. Hormis ces deux post, Christophe PERNY se garde bien de mouiller la chemise pour soutenir les candidats socialistes à ce scrutin, Marc Henri DUVERNET en particulier.
A moins de deux semaines du premier tour, le principal leader de la gauche dans le Jura, qui est par ailleurs membre du conseil fédéral du PS et directeur de campagne de Marc Henri DUVERNET reste désespérément muet. Pas un mot pour dire qu’il soutient le candidat DUVERNET, pour défendre le programme de la liste de gauche ou pour mettre en avant les qualités du candidat "socialiste" et de ses colistiers… Silence complet !
Que cherche donc Christophe PERNY en abaissant ainsi le niveau de la campagne lédonienne ? Soutenir le candidat DUVERNET ou lui savonner la planche ? Les militants socialistes sont en droit de se poser la question.
Tout le monde est en tout cas d’accord pour reconnaitre qu’avec son projet d’Eco Parc du Rocher, Christophe PERNY a passablement pourri la campagne de Marc Henri DUVERNET. Un dossier dont le candidat socialiste à la mairie de Lons le Saunier se serait bien passé et qui empoisonne sa campagne électorale. Pris entre deux feux, M. DUVERNET est contraint de se livrer à toutes sortes de contorsions pour se dépêtrer de cette situation. Il doit à la fois ménager les commerçants lédoniens sans pouvoir s’opposer à son mentor sur ce dossier hautement sensible. On a ainsi pu voir Marco affirmer que cet Eco Parc ne faisait pas partie de ses priorités, reconnaitre avoir voté au conseil général une subvention de 150 000 € pour la réalisation d’une étude du projet tout en assurant que s’il devenait maire, il fera du centre ville de Lons le cœur du commerce Jurassien !
Loin de calmer le jeu et de faciliter la tâche de son jeune camarade, toutes les occasions sont bonnes pour Christophe PERNY d’aviver un peu plus les tensions sur ce dossier. Ce fut notamment le cas lors de la dernière assemblée générale des commerçants où l’élu est parti sous les huées et les sifflets. Il se vantera même de son fait d’arme sur sa page Facebook où il notait le 6 février : « Je suis à l'assemblée générale des commerçants lédoniens... gros succès... en sifflets... j'ai dit tout haut ce que beaucoup pensent tout bas en particulier sur les horaires d'ouvertures... pas grave... on va avancer ! »
A quelques semaines des élections, cette attitude semble totalement irresponsable pour un homme sensé à moins qu’elle ne s’inscrive dans une stratégie précise !
On se souvient que Christophe PERNY est également intervenu dans les négociations avec le PC lédonien. Or, ces discussions ont abouti à une profonde division au sein de la gauche lédonienne ! Pour la première fois depuis 24 ans, les électeurs lédoniens auront le choix entre une liste PS et une liste PC au premier tour de scrutin. Une division, dont M. PERNY est le principal artisan et qui ne va pas faciliter la victoire de la gauche.
Rappelons que Christophe PERNY avait lui-même conduit la liste de gauche aux municipales de 2008 à Lons le Saunier. La liste "Changer d’ère" avait alors pris une raclée mémorable ! Jacques PELISSARD avait été réélu dès le premier tour avec 55,48 % des voix. Le chef de fil socialiste n’avait obtenu que 35,38 % des suffrages soit un plus mauvais score qu’Yves COLMOU six ans auparavant ! Pourtant, selon l’auteur du blog EdfarFaure2009, quelques mois avant le scrutin, M. PERNY fanfaronnait en réunion de section socialiste sur le thème : « Le score de COLMOU en 2001, vous prenez n'importe qui dans les rues de Lons, vous le mettez tête de liste de gauche, il fait un meilleur score ![7] » Un résultat qui tranche singulièrement avec celui de Jean-Claude WAMBST à Dole qui avait pris à Gilbert BARBIER le fauteuil de maire que celui-ci occupait depuis un quart de siècle !
S’agissant toujours de résultats électoraux, depuis que Christophe PERNY est à la tête de l’institution départementale, la gauche accumule les revers électoraux dans le Jura perdant toutes les élections, les unes après les autres. Défaite aux sénatoriales de 2011 sur fonds de division entre le PS et les écologistes dont Christophe PERNY est largement responsable. Déroute des trois candidats socialistes aux scrutins législatifs de 2012. Score plus que modeste de François HOLLANDE à la Présidentielle dans le Jura. Quant au scrutin municipal à venir, il n’est pas besoin d’être grand clerc pour entrevoir une défaite des listes de gauche à Lons, Dole et Champagnole notamment.
Bien entendu, la défaite du candidat DUVERNET ne serait pas pour déplaire à Christophe PERNY. L’apparatchik du PS local ne souhaite pas voir un autre élu de gauche, socialiste qui plus est, s’asseoir dans le fauteuil de maire de la ville préfecture. Un maire en qui il verrait un redoutable rival susceptible de gêner sa propre carrière politique.
Afin de ne pas être rendu responsable de la bérézina qui se profile, le président PERNY a fait en sorte que son nom n’apparaisse même pas sur la liste de Marco. La meilleure façon pour lui de ne pas être associé à la défaite qui s’annonce. Il aura ainsi, une fois l’échec de Marc Henri DUVERNET consommé, tout le loisir de se présenter comme le candidat "providentiel" pour le scrutin suivant.
Doit-on voir dans cette succession d’actes de simples coïncidences, le fait du hasard ou une stratégie longuement réfléchie d’un élu qui, par le passé a montré à maintes reprises sa capacité à manœuvrer pour éliminer ses concurrents ? Christophe PERNY a lui-même fourni la réponse dans les colonnes de La Voix du Jura le 12 mai 2011 : « En politique le hasard n’existe pas. Le hasard est l’excuse des mauvais perdants, des médiocres, des insuffisants !»
[1] Site web officiel de Christophe Perny lors de l’élection cantonale de 2011 : "La campagne dans la presse..."
[5] Site web officiel de Christophe Perny lors de l’élection cantonale de 2011 : "Enfin la campagne".
[6] Site web officiel de Christophe Perny lors de l’élection cantonale de 2011 : "2011, une année pour changer